Le petit shinbun

Difficile de vivre sans GPS, et pourtant nous avons tenu bon pendant deux ans, ce qui nous a occasionné quelques mésaventures. Pour silloner le Sud du Japon cet été, pas question de s'en passer, et nous pensions que l'orientation sur les routes japonaises serait désormais du gateau. Eh bien pas tout à fait...

Pour commencer, grand sourire en regardant les premiers écrans:

Après, ça se gate un peu:

Il faut en fait rentrer dans l'ordre: la région, la préfecture, la ville, le quartier puis le numéro du bloc et parfois le numéro du batiment dans le bloc (et non, il n'y a quasiment pas de nom de rues au Japon )...le tout en IDEOGRAMMES !!

Résultat: pour rentrer les 10 hotels de notre itinéraire cet été, une matinée de recherche en croisant  les différents guides et lexiques à notre portée. Mais nous sommes arrivés à bon port. Et avec un peu d'habitude, de la méthode, on finit par y arriver. Heureusement parfois, il suffit de rentrer le numero de téléphone d'un magasin ou d'un musée et l'adresse s'affiche comme par magie !

Après ces dix-sept jours hors du bercail, nous étions contents de retrouver nos "pantoufles", notre chouette appartement, notre petit quartier, nos repères maintenant bien ancrés après deux ans ici.

Après presque deux mois au vert, notre vue maintenant c'est à nouveau ça ( très typique du paysage urbain de Tokyo ):

Vu de la terrasse dont nous profiterons à nouveau quand les températures seront devenues normales.

Mais comme le dit fort justement l'auteur d'un de nos petits livres préférés sur le Japon "Allo la Terre, Ici Tokyo", " au Japon, souvent tout est question de cadrage", certaines images qui nous entourent rendent le quartier tout de même bien accueillant:

Le petit autel des ancêtres du bout de la rue

La boutique du marchand de riz à deux pas de notre immeuble devant laquelle les habitants du quartier viennent bavarder

Le petit square au look années 50 dans lequel Bastien aime retrouver ses copains de l'immeuble

L'ambiance village des petites rues environnantes avec quelques vieilles maisons en bois, le linge qui sèche aux balcons, les mamies qui arrosent leurs pots de fleurs sur le perron, la chaussée tellement propre qu'on pourrait manger par terre, les chaussures laissées à l'entrée du "sento" le bain public du quartier ( que nous n'avons pas encore essayé), les petites gargottes..

Manon, Léa et Bastien ont eu un peu de mal à digérer le changement de programme : le projet initial de vacances estivales était la Cote Ouest des États-Unis entre San Francisco et Seattle, mais le prix des vols a fini par nous faire reculer. Si par hasard l'année prochaine était notre dernière année au Japon, nous nous devions de partir un peu plus à la découverte de notre pays d'accueil.

Hésitations ensuite sur la destination nipponne: Nord ou Sud ? Les étés au Japon étant particulièrement moites et chauds, nous avons d'abord envisagé l'île d'Hokkaido.Mais beaucoup de Français nous avaient parlé de leur tour du Kuyshu, la grande île la plus au Sud, avec sur le chemin des destinations touristiques incontournables : Hiroshima, Miyajima et Himeji par exemple.

Notre périple à l'aller (en rouge) :

Tokyo--> Okayama - île de Naoshima - Hiroshima - Miyagima : sur le chemin du Kuyshu dans le Honshu

puis tour du Kuyshu : Beppu (sources volcaniques) - le volcan Aso - le parc montagneux de Kirishima - la cote du Nichinan au Sud Est- Kagoshima tout au Sud - Chiran, village de samourais, encore plus au Sud - Nagasaki puis Arita, village de potiers - Fukuoka au Nord du Kuyshu.

Enfin retour vers Tokyo ( en bleu) en deux étapes: Hagi, sur la cote Nord du Honshu qui donne sur la Mer du Japon, puis Himeji, le plus beau château du Japon, pas très loin de Kyoto.

Beaucoup de voiture, environ 3000 km, quelques beaux sites, quelques sites historiques intéressants...

Nous avons aussi découvert des coins perdus du Japon, à la population vieillissante, à l'attrait touristique discutable, ou tout au moins difficilement accessibles par des Gaijin (étrangers) illettrés comme nous. De très bons moments en famille, de bonnes parties de fou rire, de grosses déceptions qui nous ont fait partir en courant, une autre vision du Japon, pas celle que nous préférons. Nous savons maintenant que ce que nous aimons au Japon, ce sont les villes, qui sont vivantes et où le poids des traditions et du caractère insulaire de ce pays est atténué par la modernité... des magasins.

1ère étape : Okayama, petite ville provinciale, à une heure du port où l'on peut prendre le ferry pour l'île de Naoshima, aménagée il y a quelques années autour de trois musées d'art contemporains.

Après 9 heures de voiture, nous sommes heureux de nous détendre les jambes dans l'un des trois plus beaux jardins du Japon, dominé par le château impressionnant.

Naoshima ne figure pas dans les tous les guides touristiques sur le Japon. Mais j'avais vu des photos qui m'avaient fait rêver. Et heureusement les sites des offices de tourisme japonais donnent beaucoup d'informations y compris les horaires de ferries.

Cette petite île voyait sa population décliner jusqu'à ce que la Benesse Corporation la choisisse comme écrin pour accueillir sa collection d'art moderne. C'est l'architecte Takao Ando qui fut désigné pour concevoir la Benesse House, à la fois musée et hôtel au sud de l'île. Joli musée, très dépouillé, où sont exposées des oeuvres de Andy Warhol, David Hockney et Jasper Johns. Malheureusement les photos intérieures sont interdites. A l'extérieur beaucoup de statues surprenantes, dont les fameuses citrouilles de Yayoi Kusuma.

Dans le reste de l'île, deux autres sites-musées malheureusement fermés ce jour-là. Nous n'aurons donc pas vu l'autre musée créé par Takao Ando, construit en partie en souterrain et baigné par la lumière, où l'on peut voir certains des nymphéas de Monet... paraît-il.

Nous avons donc profité de la belle plage déserte en contrebas de l'hôtel Benesse, en restant quasiment tout le temps dans l'eau pour rester frais par 38 degrés. Notre plus belle baignade des vacances au Japon, sur la Mer Intérieure (le Pacifique en fait).

Un peu d'inquiétude pour le déjeuner, le village était désert et nous avons fini par atterrir dans un restau nommé "RIEN", tenu par un couple de septuagénaires dans leur maison de 2 pièces encombrée de décorations dentelées, babioles et prêt-à-porter à faire fuir, mais où nous avons eu un plat de sobas bien frais et de l'eau à volonté, comme à la maison. Nous étions bien entendu l'attraction de chaque client qui entrait. Nous n'étions pas venus pour rien et sommes repartis avec quelque chose.

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Heureux d'avoir pu visiter le musée du mémorial de la Paix avec les enfants, qui pour une fois, ont passé 3 heures dans un musée sans demander "on s'en va bientôt ?". Le musée présente les événements qui ont conduit à la guerre et au bombardement le 6 août 1945, et montre toutes les horreurs de ce bombardement, les destructions humaines et matérielles et les effets par la suite.

Le message sur les leçons de l'Histoire est bien formulé en rappelant (discrètement) que le Japon d'avant la bombe était un pays en guerre depuis plus d'un demi siècle. La visite du musée et du parc était particulièrement émouvante, 3 jours avant la cérémonie de commémoration. Tout était déjà installé pour l'événement.

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Dans les prospectus sur les voyages au Japon, le grand torii rouge baigné dans la mer fait partie des incontournables. C'est le Mont Saint-Michel japonais. D'ailleurs l'île est jumelée avec le Mont Saint Michel.

C'est à une heure d'Hiroshima en tramway et ferry. La chaleur aidant, il n'y avait pas trop de monde. C'est le temple Itsukushima-Jinja datant du 6 ème siècle qui a donné son nom à l'île. Sous sa forme actuelle, il date du 12ème siècle. Conçu comme une jetée, car à l'origine les gens n'étaient pas autorisés à poser le pied sur l'île sacrée, mais devaient s'approcher du sanctuaire en bateau en passant sous le torii flottant dans la baie.

Après la visite du sanctuaire, Xavier, commençant à être en manque d'exercice, nous a embarqués dans l'ascension du Mont Misen (530m d'altitude avec toujours 36 degrés dans l'air et 90% d'humidité) avec la promesse d'une vue magnifique et d'un distributeur de Coca frais au sommet. Evidemment quasiment personne sur le sentier - il fallait être fou. Nous n'avons pas compté les marches ni les litres d'eau que nous avons transpirés, mais cela valait l'effort - sauf pour les distributeurs de coca, remplacés par un restaurant en ruine. Et comme nous faisons souvent les choses à contre courant, nous sommes redescendus en téléphérique.

Beppu fait l'objet d'un grand battage publicitaire, mais ne mérite aucun détour. C'est l'un des plus mauvais souvenirs de notre voyage. Ville béton à l'architecture des années...60-70, aux façades jamais repeintes. Notre hôtel est épouvantablement sordide, tenu par des vieux croûtons anti-gaijins et bien qu'à deux pas du front de mer, donne sur des parkings et façades délabrées. La chambre et son mobilier sont à l'image de la ville, très datés !

L'attraction phare de Beppu, ce sont ses jigokus (littéralement, les enfers ) sources chaudes où l'eau jaillit en bouillonnant du sol. Ces enfers n'ont pas été gardés à l'état naturel, mais aménagés en mini parcs à thème. Le résultat est assez affligeant. Un instant nous nous sommes remis en question : sommes nous devenus si blasés après avoir un peu voyagé grâce à ces 6 dernières années d'expatriation ?  A coté, Yellowstone c'est le paradis ! Nous n'avons donc pas insisté et avons filé vers notre destination suivante: le mont Aso. Nous sommes cependant sûrement passés à coté d'autres villes voisines, mettant mieux en valeur ces phénomènes naturels surprenants. C'est là toute la difficulté de voyager au Japon un peu en dehors des destinations phares, car ici, personne n'attend l'étranger analphabète ! Et pourtant ce n'est pas faute d'efforts de notre part.

Premières images à l'approche de Beppu

Les fumerolles que l'on aperçoit un peu partout dans la ville

Le front de mer, coté mer (noter les mats, tres rares)

Le front de mer coté hôtel

L'enfer dit de l'étang blanc, le seul que nous ayons finalement vu

Ahhh, enfin la destination à effet Wouahhh!

Trois jours comme si nous étions entrés dans une pub Volvic ! Du vert plein les yeux ! Nous avons aussi apprécié un peu de fraicheur après un début de voyage caniculaire.

A quelques kilomètres du cratère actif, nous avons fait d'abord fait une chouette ballade dans une prairie verdoyante entre deux lacs (dont l'un quasi complètement asséché) dans le cratère aplani d'un ancien volcan.

Au centre du Kyushu s'étend la gigantesque caldeira de l'Aso-san. 128 km de circonférence, aujourd'hui parsemé de villages. C'est la plus grande caldeira en activité du monde. La dernière éruption date de 1993, et aujourd'hui le sommet est fréquemment interdit en raisons des émissions sulfureuses toxiques mais cette fois nous avons eu de la chance.

Dans cette région, il y a de nombreuses gorges et nous avons testé la ballade dominicale le long de l'une d'entre elles. Autant vous dire que nous n'étions pas tout seuls, même dans un coin perdu du Japon, il y a du monde. L'eau était très fraiche, 17 degrés peut etre, mais Bastien et Xavier se sont baignés. Que ce soit en Corse, aux US, en Australie ou au Japon, certains ne savent pas résister à l'attrait d'un torrent.

A l'hotel nous avons joui d'un bel Onsen pendant trois soirées et obtenu ce grain de peau que depuis le monde nous envie...

Du Mont Aso nous avons traversé le Kyushu vers le Sud puis piqué sur la cote Sud Est, au sud de Miyasaki. Arrivés sous de gros nuages, influence du typhon qui passait non loin de là, nous avons visité le temple d'Aoshima, sur l'île du même nom, sous une pluie torrentielle. Cette douche chaude fait partie des bons souvenirs du voyage. Nous sommes rentres trempés dans notre grande chambre japonaise avec tatamis, d'où nous avions une vue magnifique sur la mer et ledit temple. Nous vous épargnons l'etat de l'hotel ni le caractere minable de son Onsen. Un bon point: notre 2ieme hotel avec Internet.

La cote Nichinan offre de jolis paysages avec des formations rocheuses lamellées. Nous y avons visité deux temples, le premier sur l'île tout près de notre hôtel, l'autre, le Udo-Jingu, sanctuaire côtier, dont une partie se trouve dans une grotte. La coutume veut qu'on y achète 5 undamas, des petites boules de poteries (vendues par la dame en costume en photo ci dessous), que l'on fasse un voeu et que l'on essaie de les faire atterrir dans un périmètre délimité par une corde au sommet d'un rocher en forme de tortue. Les temples au Japon ont vraiment le sens du business ! Les voeux concernent généralement un mariage ou une naissance car les rochers devant la grottes représenteraient les seins de la mère d'un empereur.